Le procès des viols de Mazan, qui s’est achevé le 19 décembre 2024, s’ajoute à la liste des procès historiques qui ont marqué la société. Si aujourd’hui, en France, une femme comme Gisèle Pelicot est acclamée à sa sortie du tribunal alors que ses agresseurs se dissimulent derrière des capuches et lunettes noires, il fut une époque où les victimes de viols rasaient les murs. Des années d’errance et de carences judiciaires ont trop longtemps infligé une double peine aux victimes.

Bien que déjà considéré comme un crime par le Code pénal napoléonien de 1810, le viol était couramment requalifié en simple délit et jugé en tribunal correctionnel. En l’absence de preuves de contrainte physique, les victimes peinaient à obtenir justice.

En 1978, « le procès d’Aix-en-Provence », plus connu sous le nom de l’affaire Tonglet-Castellano, va changer la perception du viol par la société et mettre en lumière les failles du système judiciaire de l’époque.

Un petit coin de paradis se transforme en cauchemar

Tout commence le 21 août 1974. Deux jeunes femmes belges, en couple, Anne Tonglet et Araceli Castellano, campent à Morgiou, une calanque de Marseille. Serge Petrilli, un jeune homme du coin, les remarque et décide de les aborder. Très vite, les deux jeunes femmes repoussent ses avances.

« Moi qui draguais les plus belles filles de la calanque, je me faisais envoyer promener par deux boudins. Cela était intolérable et je m’étais promis de me venger », racontera-t-il aux gendarmes.

L’homme revient quelques heures plus tard avec deux complices, Guy Roger et Albert Mouglalis. La soirée tourne au cauchemar pour les deux jeunes femmes. Les trois hommes pénètrent dans leur tente, les battent puis les violent pendant plusieurs heures. Au petit matin, en état de choc, les deux victimes trouvent la force de se rendre à la gendarmerie.

Les trois hommes sont rapidement arrêtés, mais se défendent en prétextant que les deux femmes étaient consentantes. La situation se retourne peu à peu contre elles. Naturistes, lesbiennes, féministes… Elles sont perçues comme des femmes aux mœurs légères qui les auraient provoquées par leur comportement. Finalement, les trois hommes ne sont inculpés que pour coups et blessures, des délits jugés en tribunal correctionnel.

À la suite du viol, Araceli Castellano découvre qu’elle est enceinte. L’interruption volontaire de grossesse (IVG) étant interdite en Belgique, un médecin accepte malgré tout de pratiquer l’avortement. En dépit des épreuves, les deux jeunes femmes décident de se battre pour faire reconnaître leur statut de victimes.

Un procès politique et médiatique

En 1978, après quatre ans de bataille acharnée, c’est une première victoire. L’affaire est renvoyée devant la cour d’assises des Bouches-du-Rhône à Aix-en-Provence.

Les deux jeunes femmes sont défendues par une célèbre avocate, Gisèle Halimi, qui transforme ce procès en un véritable combat féministe contre la banalisation du viol.

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Par son retentissement médiatique et politique inédit, ce procès a joué un rôle clé dans l’évolution des mentalités et du droit français. En 1980, il aboutit à l’inscription d’une définition précise du viol dans le Code pénal, élargissant la notion au-delà de la seule pénétration vaginale.
 

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